Désir et plaisir

Je n’ai pas de fantasmes sexuels, est-ce normal ?

Si le cerveau de certain·es déborde de scénarios érotiques, d’autres s’inquiètent de ne pas fantasmer. Est-ce normal de ne pas avoir de fantasmes ? Sont-ils indispensables à l’épanouissement sexuel ? Éléments de réponse.

Vous ne vous retrouvez pas dans les confessions de fantasmes autour des stars hollywoodiennes, des plans à trois ou des plaisirs outdoor ? Rassurez-vous, cela ne fait pas de vous une personne sans aucune imagination ni créativité. Ni quelqu’un dont la vie sexuelle serait moins épanouie. Deux expertes décryptent l’absence de fantasmes et nous invitent à revoir notre vision de ces projections érotiques.

Peut-on ne pas avoir de fantasmes ?

Ne pas avoir de fantasmes n’a rien d’anormal ou d’étrange, si tant est que l’on puisse parler d’une quelconque norme en matière de sexualité. « Certaines personnes ne mentalisent pas du tout la sexualité et la vivent exclusivement dans leur corps. Elles peuvent fantasmer si elles le veulent (car elles ont accès au symbole et à l’imaginaire) mais cela ne les attire pas particulièrement ou ne les excite pas », confirme Marjorie Cambier, sexothérapeute. Avoir recours à des scénarios alambiqués n’est pas une condition sine qua non à une vie sexuelle épanouie. 

D’autres personnes, en revanche, n’ont pas vraiment accès à l’imaginaire. « Elles ont une pensée exclusivement opératoire, n’ont pas accès au symbole. C’est le cas notamment de certaines pathologies psychosomatiques, des personnes dites alexythymiques, celles présentant des troubles envahissants du développement », souligne la spécialiste. Les troubles de l’humeur comme la dépression ou encore certains TOCS peuvent altérer la capacité à fantasmer, de par leur symptomatologie.

Pour laisser son esprit divaguer à des pensées érotiques, encore faut-il être à l’aise avec sa sexualité. « Une éducation trop stricte marquée par un tabou autour de la sexualité, ou encore une pudeur excessive, empêche l’accès au fantasme », poursuit Marjorie Cambier.

Changer notre représentation du fantasme

Plan à trois, acteur hollywoodien, lieux interdits… On ne se retrouve pas toujours dans ces fantasmes brandis, ce qui explique que l’on ne définit pas certaines de nos envies comme des fantasmes. « Certaines personnes, notamment les femmes qui sont en proie à de multiples injonctions, ont souvent des représentations erronées de ce que devraient être les fantasmes, comme si le scénario devait forcément être spectaculaire », constate Capucine Moreau, sexologue et autrice de La créativité érotique dans le couple (La Musardine). « En tant que femmes, on a été très soumises au fait que notre désir dépend de l’autre et on n’a pas toujours cultivé notre propre imaginaire », reprend-elle.

En clair, le fantasme n’a pas besoin d’inclure Brad Pitt en tenue de policier menottes aux poignets pour être considéré comme tel. « Un fantasme peut être très simple », insiste l’experte. Repenser à un rapport sexuel agréable avec son ou sa partenaire relève du fantasme, tout comme penser au cunnilingus qu’on s’apprête à recevoir. « On associe les fantasmes à des stéréotypes, aux tendances du moment, or un fantasme peut être beaucoup plus personnel », ajoute-t-elle. « Les fantasmes se construisent avec la sexualité, les expériences de vie (bonnes ou moins bonnes), l’histoire de vie, ce qui excite, les envies, etc. C’est donc très intime et individuel », abonde Marjorie Cambier. 

Développer son imaginaire érotique pour fantasmer

Si les fantasmes permettent de nourrir l’excitation, Capucine Moreau invite à ne pas en faire une injonction. Finalement, l’important n’est pas d’avoir à tout prix des fantasmes mais bien d’être satisfait·e de sa sexualité et d’avoir du désir pour son ou sa partenaire. 

Néanmoins, si on le souhaite, il est possible de développer son imaginaire érotique et de fantasmer davantage. « On peut le développer en prenant déjà conscience de nos fantasmes, de ce qui nous excite. Puis, petit à petit, en changeant un élément du fantasme en question pour voir ce que ça donne. Cela peut prendre un peu de temps, il ne faut pas hésiter à répéter l’opération ! », suggère la sexothérapeute Marjorie Cambier. La littérature et les podcasts érotiques peuvent également constituer un bon appui pour travailler son imaginaire. 

Capucine Moreau conseille d’être à l’écoute des sensations de son corps. « L’envie sexuelle peut être très fugace et nous traverser si brièvement que nous n’avons pas le temps de la repérer », illustre-t-elle. Enfin, et parce que le fantasme va bien au-delà des pratiques sexuelles, la professionnelle encourage à programmer des moments de vide et d’ennui. L’idée ? Laisser son esprit vagabonder, rêvasser, être attentif·ve aux sons, aux odeurs pour exacerber son imaginaire, et par extension son imaginaire érotique.

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